vendredi 2 mai 2008

Aventure nippone

Mon voyage est séparé en trois parties: avant, pendant et après, auxquelles je rattache des sentiments distincts : la peur, l’étonnement et l’appréhension.

Avant de partir, j’avais beaucoup de doutes sur l’appréciation de mon voyage : je n’aimais pas le soya, je n’avais aucun repère sur la langue japonaise ou très peu, il me semblait qu’on allait voir que des temples et c’était la première fois que je partais en voyage avec des professeurs. Il me semblait aussi que l’itinéraire n’était pas encore complètement structuré ou organisé et j’avais très peur qu’on se retrouve sans moyen, au milieu du Japon.

Lorsque nous sommes arrivés à Tokyo, j’ai eu peur que ms doutes se confirment : le quartier dans lequel notre hôtel se trouvait me paraissait très louche!

C’est au courant des jours suivants que j’ai commencé à saisir l’environnement dans lequel je me trouvais –en grande partie parce que je guérissais de mon rhume! Et j’ai été frappée par le nombre stupéfiant de paradoxes qui habitaient le Japon.

J’ai été grandement marquée par le souci des Japonais pour l’environnement. Il me semblait qu’ils avaient mis en place beaucoup de structures et de moyens pour économiser l’eau, gérer les déchets, réduire les gaz à effet de serre, etc., mais d’un autre côté, leur niveau de consommation était phénoménal : la mode était présente partout, des magasins à – plus que – grande surface (!) était présents à presque tous les coins de rue, leur voiture n’avait pas plus d’une demie-douzaine d’années… c’était ahurissant de voir combien, dans un sens, ils étaient écologiques et dans un autre, comment ils consommaient.

Le deuxième paradoxe qui m’a frappé –et peut-être plus que si je n’avais pas été malade- est celui du bruit et du silence. À Shibuya surtout, où à une intersection, trois écrans géants gueulaient leurs publicités simultanément, en plus du bruit des voitures, des indicateurs sonores pour les traverses de piétons, les voitures qui défilaient pour promouvoir le nouveau disque d’une chanteuse pop, les pachinkos… le bruit était partout… sauf à l’intérieur des wagons où il y avait un étrange silence!

À Kyoto, un autre paradoxe, moins présent qu’à Tokyo, m’a étonné : celui de la technologie et de la tradition. Le temps des fêtes marquait encore plus la lutte qu’elles se livraient. Dans les rues, les gens se promenaient en kimono alors que des voitures nouvellement inventées se stationnaient à leur côté. Des immeubles à l’architecture incroyable côtoyaient des maisons typiquement japonaises… Et alors que le Japon s’ouvre à la face du monde, les Japonais sont précieux de conserver leurs cérémonies et leurs traditions qui font parties de leur quotidien.

Finalement, bien que je sache que tous les pays ont quelque chose de particulier, il me semble que le choc culturel ne pourra jamais être aussi grand et marquant que celui que j’ai vécu au Japon. Mes futurs voyages ne risquent pas de perdre en richesse, mais après avoir découvert une culture si étrangère à la mienne, mes surprises risquent d’être moindre.
Marilyne Léveillé

Premier voyage

Un voyage, c’est plus que le simple fait de changer de ville, de pays, c’est s’éloigner de son petit monde pour se rapprocher de soi-même et des autres.

Tout d’abord, il y a cet état d’esprit dans lequel on se trouve lorsque l’on franchit pour la première fois la frontière de l’inconnu et que l’on se retrouve à mille lieux de chez soi dans un univers complètement différent, saisi par le choc d’une rencontre entre deux cultures qui ne semblent pas, aux premiers abords, avoir beaucoup de points communs…
Toutes les appréhensions du départ sont présentes : pourquoi avoir quitté son monde? Pourquoi être venu ici, loin de tout ce que l’on connaît et de ceux que l’on aime? Supposément que pour tout premier voyage, il y a ce doute en plus du baptême de l’avion… Là aussi, il y a une certaine crainte, une certaine appréhension qui s’envole en même temps que l’avion. Malgré la grande distance qui sépare New-York du Japon, tout se passe bien puisque aller vers l’inconnu éveille une certaine curiosité de plus en plus palpable au fil du temps qui passe et du pays qui approche… Une sorte d’adrénaline nous envahit lorsque l’avion se pose et que l’on met enfin pied à terre. Néanmoins, il y eut une certaine déception à l’arrivée puisque cela ne répondait pas à mes attentes… on ne sait jamais ce à quoi réellement s’attendre de toute façon, mais il faut dire que les longues heures en avion épuise et nous rend quelque peu lasse. Nous ne sommes jamais dans les meilleures conditions après tout ce temps, la fatigue dans le corps, il est donc normal de ressentir quelques craintes, surprises, angoisses, surtout lorsque l’on est accueilli par un quartier assez douteux où des sans-abri nous font de grands sourires avec quelques dents manquantes…

Une bonne nuit de sommeil et la visite du premier temple fait rapidement oublier l’arrivée rocambolesque. Bientôt, c’est toute la beauté du pays qui s’épanouit sous nos yeux, la nuit ayant laissé place au soleil éclatant et notre appréhension à la plus grande excitation. Après s’être familiariser avec les lieux, vient la barrière de la langue. Elle est là certes, mais elle n’empêche nullement les Japonais d’être des plus agréables compagnies. Leur hospitalité et leur gentillesse sont vraiment sans bornes. On voit sans cesse leurs dents blanches à forces de sourires indulgents et polis. Arriver chez eux, c’est réellement aboutir dans un autre monde. On a beau essayer de rentrer dans leur bulle, on se sentira toujours un peu à part quoique toujours les bienvenus. Il est assez drôle lorsque l’on s’imagine comme dans un autre univers où l’on est en vacances et où l’on vient découvrir un pays inconnu. Pourtant, eux, ils vivent là. Les gens que l’on rencontre dans le métro vont à l’école ou travailler. Pour eux, c’est le quotidien, pour nous, c’est l’aventure.

Il y a aussi la densité de la population qui amène le sentiment que l’on n’est jamais seul. Les rues de Montréal, par la suite, semblent bien désertes… Toutefois, on a beau être sans cesse entouré d’un million de personnes, on peut encore se sentir seul puisque, bien qu’il y ait des centaines de conversations aux alentours, on ne peut en suivre aucune. De plus, paradoxalement, c’est calme et silencieux. Les gens parlent mais ne sont pas agités, ne font pas exprès pour attirer l’attention sur eux… et pourtant ils le font dans leur habillement, dans leur style. Ils sont d’un calme poli et le silence est très respecté. Avoir une population aussi dense à Montréal créerait un vrai chaos…

Il existe plusieurs autres paradoxes, d’autres contradictions dans les mœurs japonaises : entre autre, il y a la modernité face à la tradition. Le Japon est sans aucun doute le plus perfectionné des pays par rapport à la technologie, surtout en ce qui concerne Tokyo, mais c’est aussi un pays très axé sur la tradition, les cérémonies, le respect des autres et de la nature… Il est difficile pour nous de capter et de comprendre leur façon d’agir puisque nous ne venons pas de cette partie du monde. Kyoto est l’une des villes les plus intéressantes justement parce que c’est surtout là que l’on retrouve les traces de la tradition : les maisons traditionnelles et tous les temples. Il a été des plus instructifs et des plus amusants de faire l’expérience de vivre dans une maison traditionnelle pendant plus d’une semaine et pour avoir été inviter à partager un repas chez des Japonais, il faut avouer s’être totalement épris de leur hospitalité et de leur raffinement tellement différent de ce que l’on peut trouver par chez nous. La nourriture, quant à elle, est exquise avec un certain goût de rêve éveillé.

En effet, deux semaines dans un pays aussi « oriental » que le Japon, ce n’est qu’une infime parcelle de tout ce qu’il y a à découvrir dans ce coin du monde. On prend rapidement goût à cette nouvelle vie où l’inconnu nous attend au détour de chaque rue et de chaque temple. Ce n’est qu’une fois de retour chez soi que l’on ouvre les yeux sur la beauté que l’on a quittée et sur l’aventure qui a vu le jour lors de la rencontre de deux mondes. Au retour, l’adrénaline revient ainsi qu’une nouvelle appréhension : celle de retourner vivre sa routine après un aussi beau rêve. Parce que oui, tout semble être un rêve une fois revenu dans son monde. Après tout, que représentent deux semaines dans toute une vie ? Certainement pas grand chose, mais sûrement un beau rêve que l’on chérira toute sa vie, un rêve qui fut réalité l’espace d’un moment et même s’il fut trop court, personne n’oublie son premier voyage.

Marilyne Chouinard